Page:Vasari - Vies des peintres - t3 t4, 1841.djvu/575

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conviction du mieux, que l’on remarque chez les artistes de la renaissance, et qui les empêchaient de s’expliquer sur les causes de leurs recherches et de leurs préférences, font qu’on connaît maintenant avec peine, non pas la raison d’être de leurs chefs-d’oeuvre, chose que les philosophes expliquent, mais les moyens et les procédés artistiques qui les ont créés. Ainsi, pour nous, la question n’est pas tant de savoir pourquoi le Bramante est venu si complètement remplacer l’art gothique, mais bien de comprendre, d’une manière lisible, comment il s’y est pris. En effet, savoir pourquoi le Bramante parcourait toute l’Italie, de Milan à Naples, recherchant, mesurant et recomposant les débris antiques, ceci n’est point une question d’art proprement dite, c’est une question trè générale d’histoire ; car cette recherche, ouverte déjà pour l’architecture par Dioti Salvi, Arnolfo di Lapo, Brunelleschi et d’autres, correspondait à ce grand travail de restauration antique, opéré dans toutes les directions par les poètes et les savants de l’Europe au quinzième siècle.

Mais comment le Bramante a-t-il gardé une si juste mesure, et accompli une oeuvre d’éclectisme qui soit restée si originale et si pure, qu’on se laisse aller à n’y voir que l’expression spontanée et sans alliage d’un génie neuf ? car l’architecture du Bramante a quelque chose d’intime qu’on ne croirait d’abord emprunté à rien, et qui, cependant, procède bien réellement d’une imitation expresse. L’éclectisme, en fait d’art, peut-il donc, dans ses prémices, s’élever si haut, lui que nous voyons des-