Page:Verhaeren - Les Ailes rouges de la guerre, 1916.djvu/242

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Seigneur ! qu’ils étaient beaux, les clos et les chaumières
Et les jardins fleuris de maison à maison
Et les arbres marchant en rang vers l’horizon
Et s’enfonçant au loin dans l’or de sa lumière.

Qu’étaient profonds les bois, qu’étaient douces les eaux
Dans la steppe en Ukraine et la prairie en Flandre,
Quand la bonne rivière avec ses longs méandres
Serrait entre ses bras les bourgs et les hameaux.

Mais aujourd’hui, Seigneur, tout brûle au bout du monde,
Tout n’est que flamme errante et tonnerre chez nous.
Des sous-marins sournois et des avions fous
Ont ravagé les vents et saccagé les ondes.

Vers des pays de brume et de caps désolés
Et puis, là-bas, où des vagues qui montent blanches
Assiègent un roc blanc, à Douvres, sur la Manche,
Et puis jusqu’au Bosphore, et puis jusqu’à Thulé,