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À Béthléem, quand les souffles unis
Du bœuf et de l’ânon se penchèrent dessus.
Ton âme est claire à ma pensée
Qui te voit vivre, avec les fleurs
Et l’eau, dans une entente de fraîcheur
Et de splendeur exorcisées.

« Tu es toi-même une prière
Balbutiée, au cours des temps,
Depuis que s’exalte la terre
Immortelle vers le printemps.

« L’homme de pouvoir d’or et de force mitrée
Qui rythme son orgueil brutal et chamarré,
Au galop lourd de son cheval, là-bas,
N’est pas
Celui qui vit vraiment, selon sa vie.
L’eau pure, à l’entendre, s’enfuit ;
Les brindilles et les branches se cassent ;
Les oiseaux clairs s’éparpillent en vols de peur ;
Et la nature entière a la frayeur
Des éclats durs de la cuirasse. »

Pendant que la vierge parlait,
L’enfant, sans rien savoir, mêlait,