Page:Verhaeren - Les Forces tumultueuses, 1902.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Par où monte l’orgueil des recherches humaines
Et broient sous leurs pieds clairs, l’erreur qui tend ses chaînes
De l’univers à l’homme, et des hommes à Dieu.

Avez-vous vu, le soir, leurs couronnes de feu,
Temples de verre et d’or assis sur les collines,
D’où se braquent vers les étoiles sybillines,
Les monstrueux regards des lentilles d’airain ?
Et puis, en des quartiers silencieux, soudain,
Avez-vous visité les hauts laboratoires,
Où l’on poursuit, de calcul en calcul,
De chaînon en chaînon, de recul en recul,
À travers l’infini, la vie oscillatoire ?

L’homme qui juge, pense et veut,
S’y contrôle et s’y mesure soi-même.
Tous tes secrets, tous les problèmes,
Depuis cent ans, y sont l’enjeu
D’une lutte géante avec la destinée.
Combats méticuleux et science acharnée !
L’énigme est là, dont on cherche les yeux
Et qu’on frôle toujours, comme une bête hagarde,
Pour épier l’instant prodigieux,
Où, tout à coup, ces yeux vaincus se dardent,
Refoulant l’ombre et dévoilant la vérité.