Page:Verhaeren - Les Plaines, 1911.djvu/136

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Les vieux, en maugréant, reviennent
Par la prairie et ses sentiers ;
Chacun ressasse une antienne
Sur les horreurs de leur métier.

Machinale, la maigre vieille
Tapote, avec un bout de jonc,
Les plis usés de son jupon,
Quand tout à coup en eux s’éveillent.

Les angoisses d’avoir laissé,
Sans nul gardien, pendant une heure,
Les sous, pièce à pièce, amassés
Depuis trente ans, dans leur demeure.

Ils se hâtent, gagnent leur seuil,
Fouillent le fond de leur paillasse,
Comptent l’avoir, à voix très basse,
Serrés de peur, tremblants d’orgueil,