Page:Verhaeren - Les Rythmes souverains, 1910.djvu/145

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Se levèrent du fond des livres :
Selon qu’ils effleuraient tels cœurs ou tels cerveaux,
Ils acquéraient un sens plus large et plus nouveau ;
Qui les criait, le soir, sur les places publiques,
En aggravait soudain la puissance tragique ;
Leurs syllabes semblaient être faites d’airain
Pour réveiller et pour armer l’espoir humain
Et propager, parmi la peur et l’épouvante,
Le bondissant tocsin des vérités vivantes.

Un jour, en des jardins qu’avaient ornés les rois,
Avec des mains en sang fut bientôt vendangée
La vigne formidable où mûrissent les droits.
En vain les vieux décrets et les antiques lois
Repoussaient vers la nuit la justice insurgée,
La révolte eut raison des coupables pouvoirs :
Dans un air saturé de poussière et de poudre,
Devant les seuils tout à coup clairs des palais noirs,
Elle agitait, dardait et projetait sa foudre
Et, n’eût été son trop sauvage et fol élan
Qui soulevait ses bonds sans diriger leur force,