Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/148

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Des colonnes passionnées
Tordent de la douleur au firmament.
Sur les places, des buissons de flambeaux
Versent du soufre ou du mercure ;
Tel coin de monument qui se mire dans l’eau
Semble un torse qui bouge en une armure.

La ville est colossale et luit comme une mer,
Lointainement, de vagues électriques,
Et ses mille chemins de bars et de boutiques
Aboutissent, soudain, aux promenoirs d’éclair,
Où ces femmes — opale et nacre,
Satin nocturne et cheveux roux —
Avec en main des fleurs de macre,
À longs pas clairs, foulent des tapis mous.

Ce sont de très lentes marcheuses solennelles
Qui se croisent, sous les minuits inquiétants,
Et se savent — depuis quels temps ? —
Douloureuses et mutuelles.

Un soudain reflet d’incendie