Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/61

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Ils sont venus sournoisement,
Choisissant l’heure et le moment,
Les uns lents et chenus
Et les autres mâles et fermes.
Avec le sac au dos.
Ils sont venus des bourgs perdus
Gagnant les bois, tournant les fermes,
Les vieux, carcasses d’os,
Mais les jeunes, drapeaux de force.
Par des chemins rugueux comme une écorce,
Ils sont montés — et quand ils sont redescendus,
Avec leurs chiens et leurs brouettes
Et leurs ânes et leurs charrettes,
Chargés de farine ou de grain,
Par groupes noirs de pèlerins,
Les grand’routes charriaient toutes,
Infiniment, comme des veines,
Le sang du mal parmi les plaines.

Et le moulin tournait au fond des soirs,
La croix grande de ses bras noirs,
Avec des feux, comme des yeux,