Page:Verhaeren - Poèmes légendaires de Flandre et de Brabant, 1916.djvu/140

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Du fruste et primitif instinct. Il se roulait

Parmi des lèchements et des caresses telles
Qu’il se croyait au temps des fables immortelles,
Où tout ce qui se tord de joie ou de douleur,

Sous les cieux nus, s’aimait d’une énorme ferveur.


Et maintenant, voici qu’il est parti

On ne sait où, vers l’infini.
Or, depuis l’aube, à coups d’abois,
Ses chiens hurlent vers les grands bois
Et leur douleur augmente et se propage

Le soir, à travers champs, jusqu’aux derniers villages.


Renards et loups, daims et blaireaux, rats et putois

L’ont reconnue et l’ont enfin comprise.
Et tous partent, sous l’ouragan, dans la nuit grise,
Pattes folles, regards luisants, museau levé,
Ongles courbes, comme des becs.
Faisant un bruit de noyaux secs,

Jetés en tas, sur le pavé.


Et sur le seuil de la maison, le deuil
Toujours hurlant des chiens gardiens s’éplore encore,