Page:Verhaeren - Poèmes légendaires de Flandre et de Brabant, 1916.djvu/70

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Escaut,

Sauvage et bel Escaut,
Tout l’incendie
De ma jeunesse endurante et brandie,
Tu l’as épanoui :
Aussi,
Le jour que m’abattra le sort,
C’est dans ton sol, c’est sur tes bords,
Qu’on cachera mon corps,

Pour te sentir, même à travers la mort, encor !

 

Je sais ta gloire, Escaut, violente ou sereine :

Jadis, quand la Louve romaine
Mordait le monde au cœur,
La mâchoire de sa fureur,
Dans les plaines que tu protèges
N’eut à broyer que pluie et boue, et vent et neige,
Et tes hommes libres et francs,
De loin en loin, du haut des barques,
Lui laissèrent, à coups de javelots, la marque
De leur courage, au long des flancs.
Une brume, longtemps, pesa sur ton histoire :

Bruges, Ypres et Gand règnent avant Anvers,