Page:Verlaine - Poèmes saturniens, Lemerre, 1866.djvu/163

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 143 —


Un homme en robe noire, à visage de guivre,
Se penche, en caressant de la main ses fémurs,
Sur un lit, comme l’on se penche sur un livre.

Des rideaux de drap d’or roides comme des murs
Tombent d’un dais de bois d’ébène en droite ligne,
Dardant à temps égaux l’œil des diamants durs.

Dans le lit, un vieillard d’une maigreur insigne
Égrène un chapelet, qu’il baise par moment,
Entre ses doigts crochus comme des brins de vigne

Ses lèvres font ce sourd et long marmottement
Dernier signe de vie et premier d’agonie,
— Et son haleine pue épouvantablement.

Dans sa barbe couleur d’amarante ternie,
Parmi ses cheveux blancs où luisent des tons roux
Sous son linge bordé de dentelle jaunie,