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césar cascabel.

Newicargouts, des Tananas, des Kotcho-a-Koutchins et aussi, plus particulièrement vers l’embouchure du fleuve, des Pastoliks, des Haveacks, des Primskes, des Melomutes et des Indgelètes.

C’était à cette dernière tribu qu’appartenait la jeune Indienne, qui s’appelait Kayette.

Kayette n’avait plus ni père ni mère, plus personne de sa famille. Et, non seulement ce sont les familles qui finissent par disparaître ainsi, mais des tribus entières, dont on ne trouve plus trace sur le territoire alaskien.

Telle celle des Gens du Milieu, qui résidait jadis au nord du Youkon.

Kayette, restée seule sans parents, avait pris direction vers le sud, au milieu de ces contrées qu’elle connaissait pour les avoir nombre de fois parcourues avec les Indiens nomades. Son projet était de se rendre à Sitka, la capitale, où elle comptait entrer au service de quelque fonctionnaire russe. Et, certes, on l’eût acceptée, rien que sur sa mine honnête, douce, prévenante. Elle était fort jolie, ayant la peau à peine bistrée, des yeux noirs à longs cils, une abondante chevelure brune, retenue sous un capuchon de fourrure qui lui enveloppait la tête.

De taille moyenne, elle paraissait gracieuse et souple, malgré sa houppelande.

On le sait, chez ces races indiennes du Nord-Amérique, garçons et fillettes, au caractère vif et joyeux, se forment vite. À dix ans, les garçons se servent adroitement du fusil et de la hache. À quinze ans, les filles se marient et, même si jeunes, font d’excellents mères de famille. Kayette était donc plus sérieuse, plus résolue aussi, que ne le comportait son âge, et ce long voyage qu’elle venait d’entreprendre prouvait bien l’énergie de son caractère. Depuis un mois déjà, elle s’était mise en route, en descendant vers le sud-ouest de l’Alaska, et elle avait atteint cette étroite bande limitrophe des îles, où est située la capitale, lorsque, longeant la lisière de la forêt, elle avait entendu deux détonations, puis des cris désespérés, à quelques centaines de pas.