Page:Verne - Cinq Semaines en ballon.djvu/162

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cette vaste solitude l’effraya ; il était le point mathématique, le centre d’une circonférence infinie, c’est-à-dire rien ! Le Victoria disparaissait entièrement dans l’ombre. Le docteur fut envahi par un insurmontable effroi, lui, l’impassible, l’audacieux voyageur ! Il voulut revenir sur ses pas, mais en vain ; il appela ! pas même un écho pour lui répondre, et sa voix tomba dans l’espace comme une pierre dans un gouffre sans fond. Il se coucha défaillant sur le sable, seul, au milieu des grands silences du désert.



À minuit, il reprenait connaissance entre les bras de son fidèle Joe ; celui-ci, inquiet de l’absence prolongée de son maître, s’était lancé sur ses traces nettement imprimées dans la plaine ; il l’avait trouvé évanoui.

« Qu’avez-vous eu, mon maître ? demanda-t-il.

— Ce ne sera rien, mon brave Joe ; un moment de faiblesse, voilà tout.

— Ce ne sera rien, en effet, monsieur ; mais relevez-vous ; appuyez-vous sur moi, et regagnons le Victoria. »

Le docteur, au bras de Joe, reprit la route qu’il avait suivie.

« C’était imprudent, monsieur, on ne s’aventure pas ainsi. Vous auriez pu être dévalisé, ajouta-t-il en riant. Voyons, monsieur, parlons sérieusement.

— Parle, je t’écoute !

— Il faut absolument prendre un parti. Notre situation ne peut pas