Page:Verne - Cinq Semaines en ballon.djvu/247

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lui, Joe, par un vigoureux effort du poignet, se releva, et s’accrochant aux cordages, il remonta auprès de ses compagnons.



« Pas plus difficile que cela, fit-il.

— Mon brave Joe ! mon ami ! dit le docteur avec effusion.

— Oh ! ce que j’en ai fait ; répondit celui-ci, ce n’est pas pour vous ; c’est pour la carabine de M. Dick ! Je lui devais bien cela depuis l’affaire de l’Arabe ! J’aime à payer mes dettes, et maintenant nous sommes quittes, ajouta-t-il en présentant au chasseur son arme de prédilection. J’aurais eu trop de peine à vous voir vous en séparer. »

Kennedy lui serra vigoureusement la main sans pouvoir dire un mot.

Le Victoria n’avait plus qu’à descendre ; cela lui était facile ; il se retrouva bientôt à deux cents pieds du sol, et fut alors en équilibre. Le terrain semblait convulsionné ; il présentait de nombreux accidents fort difficiles à éviter pendant la nuit avec un ballon qui n’obéissait plus. Le soir arrivait rapidement, et, malgré ses répugnances, le docteur dut se résoudre à faire halte jusqu’au lendemain.

« Nous allons chercher un lieu favorable pour nous arrêter, dit-il.

— Ah ! répondit Kennedy, tu te décides enfin !

— Oui, j’ai médité longuement un projet que nous allons mettre à exécution ; il n’est encore que six heures du soir, nous aurons le temps. Jette les ancres, Joe. »

Joe obéit, et les deux ancres pendirent au-dessous de la nacelle.

« J’aperçois de vastes forêts, dit le docteur ; nous allons courir au-dessus de leurs cimes, et nous nous accrocherons à quelque arbre. Pour rien au monde, je ne consentirais à passer la nuit à terre.

— Pourrons-nous descendre ? demanda Kennedy.

— À quoi bon ? Je vous répète qu’il serait dangereux de nous séparer. D’ailleurs, je réclame votre aide pour un travail difficile. »

Le Victoria, qui rasait le sommet de forêts immenses, ne tarda pas à s’arrêter brusquement ; ses ancres étaient prises ; le vent tomba avec le soir, et il demeura presque immobile au-dessus de ce vaste champ de verdure formé par la cime d’une forêt de sycomores.