Page:Verne - Claudius Bombarnac.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur le seuil ; le seigneur Faruskiar, accompagné de Ghangir ; des voyageurs russes, turkomènes et chinois, — en tout de soixante à quatre-vingts personnes. Chacun devra se présenter à son tour devant une table, occupée par deux Célestes en costumes : un fonctionnaire, parlant couramment le russe, un interprète pour les langues allemande, française et anglaise.

Le Céleste est un homme d’une cinquantaine d’années, crâne dénudé, moustache épaisse, longue natte sur le dos, besicles sur le nez. Drapé d’une robe à ramages, obèse comme il convient aux gens distingués de son pays, il n’a point la physionomie engageante. Après tout, il ne s’agit que d’une vérification de papiers, et, puisque les nôtres sont réguliers, peu importe que la mine de ce fonctionnaire soit ou ne soit pas rébarbative.

« Quel air il a ! murmure Mme Caterna.

— L’air d’un Chinois, répond le trial, et, franchement, on ne saurait lui en vouloir ! »

Je suis un des premiers à présenter mon passeport, qui porte les visas du consul de Tiflis et des autorités russes d’Ouzoun-Ada. Le fonctionnaire l’examine attentivement. Avec les procédés de l’administration mandarine, il faut toujours être sur le qui-vive. Néanmoins, cet examen ne soulève aucune difficulté, et le cachet au dragon vert me déclare « bon pour partir ».

Même résultat en ce qui concerne le trial et la dugazon. Cependant, tandis que l’on examine ses papiers, M. Caterna vaut la peine d’être observé. Il prend des attitudes comme un inculpé qui essaye d’attendrir des juges de la correctionnelle, il fait de doux yeux, ses lèvres ébauchent un sourire, il semble implorer une grâce ou tout au moins une faveur, et pourtant le plus difficultueux des Chinois n’aurait pas une observation à lui adresser.

« Parfait, dit l’interprète.

— Merci, mon prince ! » répond M. Caterna avec l’accent du gavroche parisien.

En ce qui concerne Fulk Ephrinell et miss Horatia Bluett, cela