Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/139

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— Et pourquoi ?…

— Parce qu’il va falloir nous séparer de nouveau, monsieur Dardentor, aller, vous, d’un côté, nous, d’un autre…

— Comment… nous séparer ?…

— Sans doute, puisque la famille Désirandelle réclamera votre personne…

— Eh ! là-bas… pas de ça, Lisette ! En voilà une pommée !… Je ne permets point que l’on m’accapare de la sorte ! Que de temps en temps j’accepte de casser une croûte chez Mme Elissane, soit ! mais que l’on me tienne en laisse, jamais ! L’avant-midi et l’après-midi, je me les réserve, et j’espère que nous les emploierons à courir la ville de conserve… la ville et ses alentours…

— À la bonne heure, monsieur Dardentor ! s’exclama Jean Taconnat. Je voudrais ne pas vous quitter d’une semelle…

— Ni d’une semelle ni d’une semaine ! riposta notre Perpignanais en s’esclaffant. J’aime la jeunesse, moi, et il me semble que je me suis débarrassé de la moitié de mon âge, lorsque je suis avec des amis de moitié plus jeunes que moi ! Et pourtant… tout bien compté, je serais aisément votre père à tous deux…

— Ah ! monsieur Dardentor ! s’écria Jean Taconnat, qui ne put retenir ce cri du cœur.

— Restons donc ensemble, jeunes gens ! Ce sera trop tôt de se séparer les paumes, lorsque je partirai d’Oran pour aller… ma foi, je ne sais où…

— Après le mariage ?… observa Marcel Lornans.

— Quel mariage ?…

— Celui du fils Désirandelle…

— C’est juste… Je n’y pensais déjà plus… Hein ! quelle belle jeune fille, Mlle Louise Elissane !

— Nous l’avons trouvée telle, dès son arrivée à bord de l’Argèlès… ajouta Marcel Lornans.

— Et moi aussi, mes amis. Mais, depuis que je l’ai contemplée chez sa mère, si gracieuse, si attentionnée, si… enfin si… elle a