Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/218

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Marcel Lornans poussa vivement sa monture vers la droite, au moment où son cousin disparaissait.

« Jean… cria-t-il, Jean ?… »

Et, bien qu’il ne sût pas nager, il allait essayer de lui porter secours, au risque de se noyer lui-même, quand il vit qu’un autre l’avait précédé. Cet autre, c’était Clovis Dardentor.

Du dos de son méhari, après s’être débarrassé du zerbani qui l’enveloppait, le Perpignanais venait de se jeter dans le Sâr, et nageait vers l’endroit où l’eau bouillonnait encore.

Immobiles, haletants, épouvantés, tous regardaient le courageux sauveteur… N’avait-il pas trop présumé de ses forces ?… N’aurait-on pas à compter deux victimes au lieu d’une ?…

Au bout de quelques secondes, Clovis Dardentor reparut, traînant Jean Taconnat, à demi suffoqué, et qu’il était parvenu à dégager de ses étriers. Il le tenait par le collet, il lui relevait la tête au-dessus de l’eau, tandis que, de sa main restée libre, il le ramenait vers le gué.

Quelques instants plus tard, la caravane gravissait la berge opposée. On descendait des voitures et des chevaux, on s’empressait autour du jeune homme, qui ne tarda pas à reprendre connaissance, alors que Clovis Dardentor se secouait comme un terre-neuve tout mouillé d’un sauvetage.

Jean Taconnat comprit alors ce qui s’était passé, à qui il devait la vie, et, tendant la main à son sauveteur, au lieu du remerciement tout indiqué :

« Pas de chance ! » dit-il.

Cette réponse ne fut comprise que de l’ami Marcel.

Puis, derrière un massif d’arbres, à quelques pas de la rive, Clovis Dardentor et Jean Taconnat, auxquels Patrice apporta quelques vêtements tirés de leurs valises, se changèrent de la tête aux pieds.

La caravane se remit en route après une courte halte, et, à huit heures et demie du soir, elle terminait sa longue étape au hameau d’El-Gor.