Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/252

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Moktani, assez grièvement blessé à la hanche et au bras, fut déposé dans l’un des chars à bancs, et Patrice dut prendre sa place entre les deux bosses camelliennes de son méhari, où il se montra sportsman non moins distingué que s’il eût chevauché un pur-sang arabe.

Lorsque Marcel Lornans et Jean Taconnat furent remontés à cheval, le second dit au premier :

« Eh bien !… il nous a encore sauvés tous les deux, ce terre-neuve des Pyrénées-Orientales !… Décidément, il n’y a rien à faire avec un pareil homme !

— Rien ! » répondit Marcel Lornans.

La caravane se remit en marche. Une demi-heure plus tard, elle atteignait Sidi-Lhassen, et, à sept heures, descendait au meilleur hôtel de Sidi-bel-Abbès.

Tout d’abord, un médecin fut appelé près de Moktani afin de lui donner ses soins, et il reconnut que les blessures du guide n’auraient pas de suites graves.

À huit heures, on dîna en commun, — dîner silencieux, pendant lequel, comme par un tacite accord, les convives ne firent aucune allusion à l’attaque des fauves.

Mais, au dessert, M. Dardentor, se levant, et s’adressant à Louise d’un ton sérieux qu’on ne lui connaissait guère :

« Chère demoiselle, dit-il, vous m’avez sauvé…

— Oh ! monsieur Dardentor, répondit la jeune fille dont les joues se colorèrent d’une vive rougeur.

— Oui… sauvé… et sauvé dans un combat où, sans votre intervention, j’aurais perdu la vie !… Aussi, avec la permission de madame votre mère, puisque vous remplissez les conditions exigées par l’article 345 du code civil, mon plus vif désir serait-il de vous adopter…

— Monsieur… répliqua Mme Elissane, assez interdite de cette proposition…

— Pas d’objection, répliqua le Perpignanais, car si vous ne consentez pas…