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Page:Verne - Clovis Dardentor, Hetzel, 1900.djvu/47

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— Ni moi non plus, répondit celui-ci, bien que j’aie été forcé de stopper…

— Eh bien ! stoppez là ! » s’écria notre Perpignanais.

Et il secoua la main du capitaine Bugarach avec la vigueur d’un ancien tonnelier qui a manié le davier et la doloire.

« Savez-vous bien, ajouta-t-il, que si ma chaloupe n’avait pu rattraper votre paquebot, elle eût continué jusqu’en Algérie… et que si je n’avais pas trouvé cette chaloupe, je me serais jeté à l’eau du haut du quai, et vous aurais suivi à la nage ! Voilà comme je suis, brave capitaine Bugarach ! »

Oui ! voilà comme était Clovis Dardentor, et les deux jeunes gens, qui prenaient plaisir à entendre cet original, furent honorés d’un salut qu’ils rendirent en souriant.

« Bon type ! » murmura Jean Taconnat.

En ce moment, l’Argèlès laissa arriver d’un quart et se mit en direction du cap d’Agde.

« À propos, capitaine Bugarach, une question de la plus haute importance ? reprit M. Dardentor.

— Parlez.

— À quelle heure le dîner ?…

— À cinq heures.

— Dans quarante-cinq minutes alors… Pas plus tôt, mais pas plus tard !… »

Et M. Dardentor fit une pirouette, après avoir consulté sa magnifique montre à répétition, qu’une épaisse chaîne d’or rattachait à la boutonnière de son gilet en bonne étoffe diagonale à gros boutons métalliques.

Assurément, pour employer une locution justifiée par toute sa personne, ce Perpignanais avait « beaucoup de chic », avec son chapeau mou penché sur l’oreille droite, son mac-farlane quadrillé, sa jumelle en bandoulière, sa couverture de voyage tombant de son épaule à sa ceinture, sa culotte bouffante, ses guêtres à ardillons de cuivre, et ses bottines de chasse à double semelle.