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Cependant la capture de Jean-Sans-Nom avait jeté un profond découragement au camp de l’île Navy, et c’est bien sur ce résultat que comptaient les autorités en répandant cette nouvelle à grand bruit. Dès qu’elle fut parvenue à Chippewa, le colonel Mac Nab donna l’ordre de la propager à travers toute la province.

Mais, comment cette nouvelle avait-elle franchi la frontière canadienne ? c’est ce qu’on ignorait. Ce qui paraissait assez inexplicable, c’est qu’elle avait été connue à l’île Navy avant même de l’être au village de Schlosser. Au surplus, peu importait !

Malheureusement, l’arrestation n’était que trop certaine, et Jean-Sans-Nom manquerait à l’heure où le sort du Canada allait se jouer sur son dernier champ de bataille.

Dès que l’arrestation fut connue, un conseil fut réuni dans la journée du 11 décembre.

Les principaux chefs y assistaient avec Vincent Hodge, André Farran et William Clerc.

M. de Vaudreuil, qui commandait le camp de l’île Navy, présidait ce conseil.

Vincent Hodge porta tout d’abord la discussion sur le point de savoir s’il n’y aurait pas lieu de tenter quelque coup de force pour délivrer Jean-Sans-Nom.

« C’est à Frontenac qu’il est enfermé, dit-il. La garnison de ce fort est peu nombreuse, et une centaine d’hommes déterminés l’obligeraient à se rendre. Il ne serait pas impossible de l’atteindre en vingt-quatre heures…

— Vingt-quatre heures ! répondit M. de Vaudreuil. Oubliez-vous donc que Jean-Sans-Nom était condamné avant d’avoir été pris ? C’est en douze heures, c’est cette nuit même qu’il faudrait arriver à Frontenac !

— Nous y arriverons, répondit Vincent Hodge. Le long de la rive de l’Ontario, aucun obstacle ne nous arrêtera jusqu’à la frontière du Saint-Laurent, et, comme les royaux n’auront pas été prévenus de notre projet, ils ne pourront nous disputer le passage.