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maigre verdure. Aussi, pas un oiseau n’animait-il cet âpre territoire. Rien n’y vivait, rien ne s’y mouvait, ni dans l’ordre végétal, ni dans l’ordre animal.

L’équipage de la Dobryna n’eut donc pas à s’étonner si les oiseaux de mer, albatros, mouettes et goëlands, aussi bien que les pigeons de roche, vinrent chercher refuge sur la goëlette. Aucun coup de fusil ne pouvait en éloigner ces volatiles, qui, nuit et jour, restaient perchés sur les vergues. Quelques bribes de nourriture étaient-elles jetées sur le pont, ils s’y précipitaient aussitôt, se battant avec fureur, se repaissant avec voracité. À les voir si affamés, on devait croire qu’il n’y avait pas un seul point de ces parages qui pût leur procurer quelque aliment. En tout cas, ce n’était pas ce littoral, puisqu’il paraissait être absolument privé de plantes et d’eau.

Telle était cette côte bizarre, que prolongea la Dobryna pendant plusieurs jours. Son profil se modifiait parfois et présentait alors, pendant plusieurs kilomètres, une seule arête, vive et nette, comme si elle eût été finement menuisée. Puis, les grandes lamelles prismatiques reparaissaient dans un inextricable enchevêtrement. Mais jamais, au pied de la falaise, ne s’étendait ni une grève de sable, ni un rivage de galets, ni une bande de ces écueils qui sèment ordinairement les eaux peu profondes. À peine d’étroites criques s’ouvraient-elles çà et là. Pas une aiguade ne se voyait, à laquelle un navire pût faire sa provision d’eau. Par-