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HIER ET DEMAIN.

idylle se noua peu à peu entre les deux jeunes gens. Ce que n’avait pu faire la calme énergie de Jean, la faconde et le caractère un peu brutal de Pierre le firent. À l’amour grandissant de celui-ci, Marie répondit par un semblable amour. Deux ans après la mort de la veuve Morénas, trois ans après le meurtre de l’oncle Sandre et la condamnation de l’assassin, le mariage des deux jeunes gens fut célébré.

Sept années s’écoulèrent, pendant lesquelles trois enfants leur naquirent, le dernier six mois à peine avant le jour où commence ce récit. Heureuse épouse, heureuse mère, Marie avait alors vécu sept années de bonheur.

Elle eût été moins heureuse, si elle avait pu lire dans le cœur de son mari, si elle avait su l’existence vagabonde que, pendant six années, allant du chapardage à la rapine, de la rapine à l’escroquerie, de l’escroquerie au vol pur et simple, avait menée celui à qui sa vie était liée, si elle avait connu surtout quelle part il avait prise à la mort de son parrain.

Alexandre Tisserand avait dit la vérité en dénonçant son neveu, mais combien il était déplorable que les affres de l’agonie, troublant son cerveau et sa main, l’eussent empêché de mieux préciser ! C’était bien son neveu, en effet, qui était l’auteur du crime abominable, mais, ce neveu, ce n’était pas Jean, c’était Pierre Morénas.