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LA DESTINÉE DE JEAN MORÉNAS.

voudrait-il profiter de l’occasion, ce qui diminuerait les chances de réussite.

Le vieux forçat n’ayant plus que dix-huit mois de fers, Jean s’efforça de lui démontrer que, pour si peu, il ne devait pas risquer une augmentation de peine. Mais Romain, qui voyait de l’argent au bout de tout cela, ne voulait pas entendre raison et refusait obstinément de se prêter aux combinaisons de son camarade. Cependant, lorsque celui-ci parla d’un millier de francs payables sur-le-champ et d’une somme égale qui pourrait bien attendre le vieux à la sortie du bagne, Romain commença à ne plus faire la sourde oreille et à donner dans les idées de son compagnon de chaîne.

Ce point réglé, il restait à décider du mode d’évasion. L’essentiel était de sortir du port sans être aperçu et, par conséquent d’échapper aux regards exercés des factionnaires et des gardes-chiourme. Une fois dans la campagne, avant que les brigades de gendarmerie fussent prévenues, il serait facile d’en imposer aux paysans, et, quant à ceux que l’espoir de la prime rendrait plus clairvoyants, ils ne résisteraient certainement pas à l’appât d’une somme supérieure.

Jean Morénas résolut de s’évader pendant la nuit. Bien qu’il fût condamné à terme, il n’était pas logé dans un des vieux navires transformés en bagnes flottants. Par exception, il habitait une des prisons