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HIER ET DEMAIN.

notre époque, et qui autorisait à croire à sa victoire définitive sur la nature.

— Cependant, fit de sa petite voix flûtée le président Mendoza, profitant de l’instant de silence qui suivit cette conclusion finale, je me suis laissé dire que des peuples, aujourd’hui disparus sans laisser la moindre trace, étaient déjà parvenus à une civilisation égale ou analogue à la nôtre.

— Lesquels ? interrogea la table, tout d’une voix.

— Eh mais !… les Babyloniens, par exemple.

Ce fut une explosion d’hilarité. Oser comparer les Babyloniens aux hommes modernes !

— Les Égyptiens, continuait don Mendoza tranquillement.

On rit plus fort autour de lui.

— Il y a aussi les Atlantes, que notre ignorance seule rend légendaires, poursuivit le président. Ajoutez qu’une infinité d’autres humanités, antérieures aux Atlantes eux-mêmes, ont pu naître, prospérer et s’éteindre sans que nous en ayons aucune connaissance !

Don Mendoza persistant dans son paradoxe, on consentit, afin de ne pas le froisser, à faire semblant de le prendre au sérieux.

— Voyons, mon cher président, insinua Moreno, du ton que l’on a soin d’adopter pour faire entendre raison à un enfant, vous ne voulez pas prétendre, j’imagine, qu’aucun de ces anciens peuples puisse être comparé à nous ?… Dans l’ordre moral, j’admets qu’ils se