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M. RÉ-DIÈZE ET Mlle MI-BÉMOL.

— Alors qui donc est là ? murmure Mme Clère, peu rassurée.

— Nous le saurons ! » s’écrie M. le Curé, en boutonnant sa pelisse.

L’orgue continuait à se faire entendre. C’était comme une tempête de sons qui en sortait. Les seize-pieds travaillaient à plein vent ; le gros nasard poussait des sonorités intenses ; même le trente-deux-pieds, celui qui possède la note la plus grave, se mêlait à cet assourdissant concert. La place était comme balayée par une rafale de musique. On eût dit que l’église n’était plus qu’un immense buffet d’orgue, avec son clocher comme bourdon, qui donnait des contre-fa fantastiques.

J’ai dit que le porche était fermé, mais, en faisant le tour, la petite porte, précisément en face le cabaret Clère, était entr’ouverte. C’était par là que l’intrus avait dû pénétrer. D’abord M. le Curé, puis le bedeau qui venait de le rejoindre, entrèrent. En passant, ils trempèrent leurs doigts dans la coquille d’eau bénite, par précaution, et se signèrent. Puis, toute la suite en fit autant.

Soudain, l’orgue se tut. Le morceau joué par le mystérieux organiste s’arrêta sur un accord de quarte et sixte qui se perdit sous la sombre voûte.

Était-ce l’entrée de tout ce monde qui avait coupé court à l’inspiration de l’artiste ? Il y avait lieu de le croire. Mais, à présent,