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KÉRABAN-LE-TÊTU.

Tout à coup, à peu de distance de l’une des trombes, retentit une sourde détonation, que venait de précéder un vif éclat de lumière.

« Un coup de canon, cette fois ! » s’écria Ahmet, en tendant la main dans la direction observée.

Le gardien avait aussitôt concentré sur ce point toute la puissance de son regard.

« Oui !… Là… là ?… » fit-il.

Et dans l’illumination d’un vaste éclair, Ahmet venait d’apercevoir un bâtiment de médiocre tonnage, qui luttait contre la tempête.

C’était une tartane, désemparée, sa grande antenne en lambeaux. Sans aucun moyen de pouvoir résister, elle dérivait irrésistiblement vers la côte. Avec des roches sous le vent, avec la proximité de ces deux trombes qui se dirigeaient vers elle, il était impossible qu’elle pût échapper à sa perte. Engloutie ou mise en pièces, ce ne devait plus être que l’affaire de quelques instants.

Et cependant, elle résistait, cette tartane. Peut-être, si elle échappait à l’attraction des trombes, trouverait-elle quelque courant qui la porterait dans le port ? Avec ce vent qui battait en côte, même à sec de toile, peut-être saurait-elle donner dans le chenal, dont le feu du phare lui mar-