Entraîné par sa loquacité naturelle, Sébastien Zorn commence à se répandre en une interminable série d’objurgations à tout le moins inutiles, lorsque Frascolin l’interrompt par ces mots :
« Laisse-moi faire, mon vieux Zorn. »
Puis, s’adressant de nouveau au conducteur :
« Où sommes-nous, mon ami ?…
— À cinq milles de Freschal.
— Une station de railway ?…
— Non… un village près de la côte.
— Et y trouverons-nous une voiture ?…
— Une voiture… point… peut-être une charrette…
— Une charrette à bœufs, comme au temps des rois mérovingiens ! s’écrie Pinchinat.
— Qu’importe ! dit Frascolin.
— Eh ! reprend Sébastien Zorn, demande-lui plutôt s’il existe une auberge dans ce trou de Freschal… J’en ai assez de courir la nuit…
— Mon ami, interroge Frascolin, y a-t-il une auberge quelconque à Freschal ?…
— Oui… l’auberge où nous devions relayer.
— Et pour rencontrer ce village, il n’y a qu’à suivre la grande route ?…
— Tout droit.
— Partons ! clame le violoncelliste.
— Mais, ce brave homme, il serait cruel de l’abandonner là… en détresse, fait observer Pinchinat. Voyons, mon ami, ne pourriez-vous pas… en vous aidant…
— Impossible ! répond le conducteur. D’ailleurs, je préfère rester ici… avec mon coach… Quand le jour sera revenu, je verrai à me sortir de là…
— Une fois à Freschal, reprend Frascolin, nous pourrions vous envoyer du secours…
— Oui… l’aubergiste me connaît bien, et il ne me laissera pas dans l’embarras…