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un casus belli.

la chaloupe à son poste. En vain le nom de Pinchinat est-il crié par toutes les bouches ! Et, moins troublés qu’ils le sont, peut-être le pilote et ses compagnons auraient-ils pu apercevoir derrière les buissons quelques-uns de ces farouches Fidgiens, qui épient leur départ.

L’embarcation n’a point été inquiétée. Le matelot n’a vu personne rôder sur les rives de la Rewa.

C’est avec un inexprimable serrement de cœur que Sébastien Zorn, Frascolin, Yvernès, se décident à prendre place dans le bateau… Ils hésitent… ils appellent encore… Mais il faut partir, a dit Frascolin, et il a eu raison de le dire, et l’on a raison de le faire.

Le mécanicien met les dynamos en activité, et la chaloupe, servie par le jusant, descend le cours de la Rewa avec une rapidité prodigieuse.

À six heures, la pointe ouest du delta est doublée. Une demi-heure après, on accoste le pier de Tribord-Harbour.

En un quart d’heure, Frascolin et ses deux camarades, transportés par le tram, ont atteint Milliard-City et se rendent à l’hôtel de ville.

Dès qu’il a été mis au courant, Cyrus Bikerstaff se fait conduire à Suva et, là, il demande au gouverneur général de l’archipel une entrevue qui lui est accordée.

Lorsque ce représentant de la reine apprend ce qui s’est passé à Tampoo, il ne dissimule pas que cela est très grave… Ce Français aux mains d’une de ces tribus de l’intérieur qui échappent à toute autorité…

« Par malheur, nous ne pouvons rien tenter avant demain, ajoute-t-il. Contre le reflux de la Rewa, nos chaloupes ne pourraient remonter à Tampoo. D’ailleurs, il est indispensable d’aller en nombre, et le plus sûr serait de prendre à travers la brousse…

— Soit, répond Cyrus Bikerstaff, mais ce n’est pas demain, c’est aujourd’hui, c’est à l’instant qu’il faut partir…

— Je n’ai pas à ma disposition les hommes nécessaires, répond le gouverneur.