Page:Verne - L'Île à hélice, Hetzel, 1895.djvu/451

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
412
l’île à hélice.

campagne qui confinait à la batterie de la Poupe, et sur laquelle se trouvent environ quatre mille naufragés.

Enfin, une douzaine de morceaux, mesurant chacun quelques centaines de mètres carrés, donnent asile au reste de la population sauvée du désastre.

Voilà tout ce qui reste de ce qui fut le Joyau du Pacifique !

Il convient donc d’évaluer à plusieurs centaines les victimes de cette catastrophe. Et que le ciel soit remercié de ce que Standard-Island n’ait pas été engloutie en entier sous les eaux du Pacifique !

Mais, si elles sont éloignées de toute terre, comment ces fractions pourront-elles atteindre quelque littoral du Pacifique ?… Ces naufragés ne sont-ils pas destinés à périr par famine ?… Et survivra-t-il un seul témoin de ce sinistre, sans précédent dans la nécrologie maritime ?…

Non, il ne faut pas désespérer. Ces morceaux en dérive portent des hommes énergiques et tout ce qu’il est possible de faire pour le salut commun, ils le feront.

C’est sur la partie voisine de la batterie de l’Éperon que sont réunis le commodore Ethel Simcoë, le roi et la reine de Malécarlie, le personnel de l’observatoire, le colonel Stewart, quelques-uns de ses officiers, un certain nombre des notables de Milliard-City, les membres du clergé, — enfin une partie importante de la population.

Là aussi se trouvent les familles Coverley et Tankerdon, accablées par l’effroyable responsabilité qui pèse sur leurs chefs. Et ne sont-elles déjà frappées dans leurs plus chères affections, puisque Walter et miss Dy ont disparu !… Est-ce un des autres fragments qui les a recueillis ?… Peut-on espérer de jamais les revoir ?…

Le Quatuor Concertant, de même que ses précieux instruments, est au complet. Pour employer une formule connue, « la mort seule aurait pu les séparer ! » Frascolin envisage la situation avec sang-froid et n’a point perdu tout espoir. Yvernès, qui a l’habitude de considérer les choses par leur côté extraordinaire, s’est écrié devant ce désastre :

« Il serait difficile d’imaginer une fin plus grandiose ! »