de promontoires et de coteaux qui limitent le golfe de Clyde. D’ailleurs, le steamer passait alors devant la bourgade d’Helensburgh. Port-Glasgow, les restes du château de Newark, la presqu’île de Rosenheat, c’était ce que la jeune châtelaine voyait chaque jour des fenêtres de son cottage. Aussi se demandait-elle si le steamer ne naviguait pas sur les capricieux cours d’eau du parc.
Et plus loin, pourquoi sa pensée aurait-elle été se perdre au milieu des centaines de navires qui se pressaient dans les bassins de Greenock, à l’embouchure du fleuve ? Que lui importait que l’immortel Watt fût né dans cette ville de quarante mille habitants, qui est comme l’antichambre industrielle et commerciale de Glasgow ? Pourquoi, trois milles au delà, eût-elle arrêté ses regards sur le village de Gourock à gauche, sur le village de Dunoon à droite, sur les fiords dentelés et sinueux, qui mordent si profondément les cordons littoraux du comté d’Argyle, échancré comme une côte de Norvège ?
Non ! miss Campbell cherchait impatiemment des yeux la tour en ruines de Leven. S’attendait-elle à y voir apparaître quelque lutin ? Pas le moins du monde ; mais elle voulait être la première à signaler le phare de Clock, qui éclaire la sortie du Firth of Clyde.
Le phare apparut enfin, comme une gigantesque lampe, au tournant de la rive.
« Clock, oncle Sam, dit-elle, Clock, Clock !
— Oui, Clock ! répondit le frère Sam, avec la précision d’un écho des Highlands.
— La mer, oncle Sib !
— La mer, en effet, répondit le frère Sib.
— Que cela est beau ! » répétèrent les deux oncles.
On aurait pu croire qu’ils la voyaient pour la première fois !
Il n’y avait pas d’erreur possible : à l’ouvert du golfe, c’était bien un horizon de mer.
Cependant le soleil n’avait pas encore dépassé le milieu de sa course diurne. Sous le cinquante-sixième parallèle, sept heures, au moins, devaient donc s’écouler avant qu’il ne disparût sous les flots, — sept heures d’impatience pour miss Campbell ! D’ailleurs cet horizon se dessinait dans le sud-ouest, c’est-à-dire sur un segment d’arc que l’astre radieux n’effleure qu’à l’époque du solstice d’hiver. Ce n’était donc pas là qu’il fallait chercher l’apparition du phénomène ; ce serait plus à l’ouest, et même un peu au nord,