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l’école des robinsons

la tradition fut rompue. En vain tous deux fouillèrent-ils la lisière rocheuse sur la partie septentrionale de la baie. Pas de caverne, pas de grotte, pas un seul trou qui pût servir d’abri. Il fallut y renoncer. Aussi Godfrey résolut-il d’aller en reconnaissance jusqu’aux premiers arbres de l’arrière-plan, au delà de cette lisière sablonneuse.

Tartelett et lui remontèrent donc le talus de la première ligne des dunes, et ils s’engagèrent à travers les verdoyantes prairies qu’ils avaient entrevues quelques heures auparavant.

Circonstance bizarre et heureuse à la fois, les autres survivants du naufrage les suivaient volontairement. Évidemment, coqs, poules, moutons, chèvres, agoutis, poussés par leur instinct, avaient tenu à les accompagner. Sans doute ils se sentaient trop seuls sur cette grève, qui ne leur offrait de ressources suffisantes ni en herbes ni en vermisseaux.

Trois quarts d’heure plus tard, Godfrey et Tartelett, — ils n’avaient guère causé pendant cette exploration, — arrivaient à la lisière des arbres. Nulle trace d’habitations ni d’habitants. Solitude complète. On pouvait même se demander si cette partie de la contrée avait jamais reçu l’empreinte d’un pied humain !

En cet endroit, quelques beaux arbres poussaient par groupes isolés, et d’autres, plus pressés à un quart de mille en arrière, formaient une véritable forêt d’essences diverses.

Godfrey chercha quelque vieux tronc, évidé par les ans, qui pût offrir un abri entre ses parois ; mais ses recherches furent vaines, bien qu’il les eût poursuivies jusqu’à la nuit tombante.

La faim les aiguillonnait vivement alors, et tous deux durent se contenter des coquillages, dont ils avaient préalablement fait une ample récolte sur la grève. Puis, brisés de fatigue, ils se couchèrent au pied d’un arbre et s’endormirent, comme on dit, à la grâce de Dieu.