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LA CHASSE AU MÉTÉORE

— À ce compte, s’exclama M. Lecœur, tu pourrais détraquer toute la mécanique céleste ! »

Zéphyrin Xirdal ne parut point troublé par l’énormité de cette hypothèse.

« Actuellement, reconnut-il avec une modeste simplicité, la machine que j’ai construite ne peut me donner que des résultats beaucoup plus faibles. Elle est suffisante, cependant, pour influencer un méchant bolide de quelques milliers de tonnes.

« Ainsi soit-il ! conclut M. Lecœur qui commençait à être ébranlé. Mais où comptes-tu le faire tomber, ton bolide ?

— Dans mon terrain.

— Quel terrain ?

— Celui que vous m’achèterez, quand j’aurai fait les calculs nécessaires. Je vous écrirai à ce sujet. Bien entendu, je ferai choix, autant que possible, d’une région presque déserte où le sol est sans valeur. Par exemple, vous aurez sans doute des difficultés pour passer l’acte de vente. Je ne suis pas absolument libre de mon choix, et il peut arriver que le pays ne soit pas d’accès très commode.

— Ça, c’est mon affaire, dit le banquier. Le télégraphe n’a pas été inventé pour autre chose. Je te réponds de tout à cet égard. »

Muni de cette assurance et des dix mille francs mis en paquet à même sa poche, Zéphyrin Xirdal retourna chez lui à grandes enjambées, comme il en était venu, et, à peine enfermé, s’assit à sa table préalablement déblayée d’un revers de main, selon sa méthode ordinaire.

La crise de travail battait décidément son plein. Toute la nuit, il s’acharna dans ses calculs, mais, le matin venu, la solution était trouvée. Il avait déterminé la force qu’il fallait appliquer au bolide, les heures pendant lesquelles cette force devait être appliquée, les directions qu’il convenait de lui donner, le lieu et la date de la chute du météore.

Il prit aussitôt la plume, écrivit à M. Lecœur la lettre promise, qu’il descendit jeter à la boîte, et remonta s’enfermer chez lui.

La porte close, il s’approcha de l’un des coins de sa chambre, celui-là même dans lequel il avait envoyé la veille avec une précision si remarquable le tas de papiers qui recouvrait précédemment la lunette. Il s’agissait aujourd’hui de faire l’opération inverse. Xirdal insinua donc son bras sous les paperasses