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LA CHASSE AU MÉTÉORE

une nourriture qu’ils n’eussent trouvée ni à Godhavn, ni en aucune autre station du littoral.

Cinq jours s’étaient écoulés depuis l’arrivée du Mozik lorsque, dans la matinée du 16 août, un dernier bâtiment fut signalé au large d’Upernivik. C’était un steamer, qui se glissait à travers les îles et îlots de l’archipel pour venir prendre son mouillage. À la corne de sa brigantine flottait le pavillon aux cinquante et une étoiles des États-Unis d’Amérique.

À n’en pas douter, ce steamer amenait un nouveau lot de curieux sur le théâtre du grand fait météorologique, des retardataires, qui, d’ailleurs, n’arriveraient point en retard, puisque le globe d’or gravitait encore dans l’atmosphère.

Vers onze heures du matin, le steamer Oregon laissait tomber son ancre au milieu de la flottille. Un canot s’en détachait aussitôt et mettait à terre un des passagers sans doute plus pressé que ses compagnons de voyage.

Ainsi que le bruit s’en répandit sur-le-champ, c’était un des astronomes de l’observatoire de Boston, un certain M. Wharf, qui se rendit chez le chef du gouvernement. Celui-ci prévint sans tarder M. de Schnack, et le délégué se rendit à la maisonnette au toit de laquelle se déployait le drapeau national.

L’anxiété fut grande. Le bolide allait-il, par hasard, fausser compagnie à tout le monde, et « filer à l’anglaise » vers d’autres parages célestes, selon le vœu de Francis Gordon ?

On fut bientôt rassuré à cet égard. Le calcul avait conduit J. B. K. Lowenthal à des conclusions exactes, et c’est uniquement pour assister à la chute du bolide, à titre de représentant de son chef hiérarchique, que M. Wharf avait entrepris ce long voyage.

On était au 16 août. Il s’en fallait donc encore de trois fois vingt-quatre heures que le bolide reposât sur la terre groenlandaise.

« À moins qu’il ne s’en aille par le fond !… » murmurait Francis Gordon, seul, d’ailleurs, à concevoir cette pensée, et à formuler cette espérance.

Mais que l’affaire dût ou non avoir ce dénouement, on ne le saurait que dans trois jours. Trois jours, ce n’est guère et c’est quelquefois beaucoup, tout particulièrement au Groenland, où il serait osé de prétendre que les plaisirs pèchent par leur abon-