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un hivernage dans les glaces.

tement. Il fallait, dans ce cas, avoir recours aux frictions de neige, qui seules pouvaient sauver la partie malade.

Penellan recommanda fortement aussi l’usage des ablutions froides, chaque matin. Il fallait un certain courage pour se plonger les mains et la figure dans la neige, que l’on faisait dégeler à l’intérieur. Mais Penellan donna bravement l’exemple, et Marie ne fut pas la dernière à l’imiter.

Jean Cornbutte n’oublia pas non plus les lectures et les prières, car il s’agissait de ne pas laisser dans le cœur place au désespoir ou à l’ennui. Rien n’est plus dangereux dans ces latitudes désolées.

Le ciel, toujours sombre, remplissait l’âme de tristesse. Une neige épaisse, fouettée par des vents violents, ajoutait à l’horreur accoutumée. Le soleil allait disparaître bientôt. Si les nuages n’eussent pas été amoncelés sur la tête des navigateurs, ils auraient pu jouir de la lumière de la lune, qui allait devenir véritablement leur soleil pendant cette longue nuit des pôles ; mais, avec ces vents d’ouest, la neige ne cessa pas de tomber. Chaque matin, il fallait déblayer les abords du navire et tailler de nouveau dans la glace un escalier qui permît de descendre sur la plaine. On y réussissait facilement avec les couteaux à neige ; une fois les marches découpées, on jetait un peu d’eau à leur surface, et elles se durcissaient immédiatement.

Penellan fit aussi creuser un trou dans la glace, non loin du navire. Tous les jours on brisait la nouvelle croûte qui se formait à sa partie supérieure, et l’eau que l’on y puisait à une certaine profondeur était moins froide qu’à la surface.

Tous ces préparatifs durèrent environ trois semaines. Il fut alors question de pousser les recherches plus avant. Le navire était emprisonné pour six ou sept mois, et le prochain dégel pouvait seul lui ouvrir une nouvelle route à travers les glaces. Il fallait donc profiter de cette immobilité forcée pour diriger des explorations dans le nord.


VIII

plan d’exploration


Le 9 octobre, Jean Cornbutte tint conseil pour dresser le plan de ses opérations, et, afin que la solidarité augmentât le zèle et le courage de chacun, il y admit tout l’équipage. La carte en main, il exposa nettement la situation présente.