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LE PILOTE DU DANUBE.

il en arrivait, en constatant la fuite du temps, à regretter sa prison flottante qui, du moins, le rapprochait de Roustchouk.

Le troisième jour, enfin, — on était alors au 10 septembre, — sa porte s’ouvrit, et il fut invité à quitter sa cellule. Encadré par quatre soldats, baïonnette au canon, il suivit un long couloir, descendit un interminable escalier, puis traversa une rue, au delà de laquelle il pénétra dans le Palais de Justice, bâti en face de la prison.

Dans cette rue, le populaire grouillait, se pressant derrière un cordon d’agents de police. Quand le prisonnier apparut, de féroces clameurs s’élevèrent de cette foule, avide d’exprimer sa haine pour le malfaiteur redouté et si longtemps impuni. Quel que fût le sentiment de Serge Ladko en se voyant en butte à cette injure imméritée, il n’en laissa rien paraître. D’un pas ferme, il entra dans le Palais, et, après une nouvelle attente, se trouva enfin devant son juge.

M. Izar Rona, petit homme malingre, blond, la barbe rare, au teint jaune et bilieux, était un magistrat de la manière forte. Procédant par affirmations tranchantes, par dénégations brutales, il attaquait l’adversaire à coups de boutoir, plus désireux d’inspirer la terreur que de gagner la confiance.

Les gardes s’étaient retirés sur un signe du juge. Debout au milieu de la pièce, Serge Ladko attendait qu’il plût à celui-ci