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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

l’attelage emporté. Telle était la surexcitation publique, que des coups de mousquet partirent du magasin situé à l’angle de la rue du Prince Miloch.

Un des chevaux tomba, frappé d’une balle à la cuisse. La voiture, heurtant le corps de l’animal, fut culbutée.

Aussitôt, la foule de s’élancer, de s’accrocher aux roues, à la caisse, aux brancards. Cent bras s’ouvrirent pour saisir Wilhelm Storitz… Ils n’étreignirent que le vide.

Le conducteur invisible avait-il donc réussi à sauter du char à bancs, avant que celui-ci n’eût été renversé, car on ne pouvait pas douter qu’il avait voulu épouvanter la ville une fois de plus.

Il n’en était rien, il fallut bien le reconnaître. Bientôt accourut un paysan de la puszta, dont les chevaux, arrêtés au marché Coloman, s’étaient emportés en son absence. Quelle ne fut pas sa colère, lorsqu’il vit l’un d’eux étendu sur le sol ! On ne voulait pas l’entendre, et je crus que la foule allait maltraiter ce pauvre homme que nous eûmes quelque peine à protéger contre ces aveugles fureurs.

J’entraînai le capitaine Haralan, qui me suivit sans mot dire à la Maison de Ville.

M. Stepark était déjà informé de ce qui venait de se passer rue du Prince Miloch.

« La ville est affolée, me dit-il, et on ne peut prévoir jusqu’où ira cet affolement.

Je posai mes questions habituelles :

— Avez-vous appris quelque chose de nouveau ?

— Oui, répondit M. Stepark, on m’a informé de la présence de Wilhelm Storitz à Spremberg.

— À Spremberg !… s’écria la capitaine Haralan, en se retournant vers moi. Partons ! J’ai votre promesse.

Je ne savais que répondre, car j’étais certain de l’inutilité de ce voyage.

— Attendez, capitaine, intervint M. Stepark. J’ai demandé à