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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

Le docteur et mon frère, qui répétait d’une voix brisée le nom de sa femme, allaient et venaient comme des fous.

— Myra ?… demandai-je, que veux-tu dire, Marc ?

Le docteur eut à peine la force de me répondre :

— Ma fille… disparue !

Il fallut déposer sur son lit Mme Roderich qui avait perdu connaissance. Le capitaine Haralan, la figure convulsée, les yeux hagards, vint à moi, et me dit :

— Lui… lui toujours !

Cependant j’essayais de réfléchir. L’opinion du capitaine Haralan était difficilement soutenable. Il n’était pas admissible que Wilhelm Storitz eût réussi à s’introduire dans l’hôtel, malgré les précautions prises. Évidemment, il était à la rigueur concevable qu’il eût profité du désordre inévitable que cause un départ. Mais il aurait fallu pour cela qu’il se tînt à l’affût en guettant le moment propice, et qu’il opérât avec une rapidité prodigieuse.

D’ailleurs, même en acceptant toutes ces hypothèses, un enlèvement demeurait inexplicable. Je n’avais pas, en effet, quitté la porte de la galerie devant laquelle stationnait la berline. Comment Myra aurait-elle pu franchir cette porte pour gagner celle du jardin sans être vue de moi ? Wilhelm Storitz invisible, soit ! Mais elle ?…

Je redescendis dans la galerie et j’appelai le domestique. La porte du jardin donnant sur le boulevard Tékéli fut fermée à double tour, et j’en retirai la clef. Puis la maison tout entière, les combles, les caves, les annexes, la tour jusqu’à la terrasse, je la parcourus en ne laissant pas un coin inexploré. Après la maison, ce fut le jardin…

Je ne trouvai personne.

Je revins près de Marc. Mon pauvre frère pleurait à chaudes larmes, il éclatait en sanglots.

Prévenir le Chef de la Police était la première chose à faire, à mon avis.