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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

signala au docteur, qui se contenta de la rassurer, sans lui rien dire de la récente visite de L’énigmatique personnage.

J’ajouterai que, lorsque Marc et moi nous sortîmes pour aller à l’hôtel Temesvar, cet homme nous rencontra sur la place Magyare. Dès qu’il aperçut mon frère, il s’arrêta d’un mouvement brusque et parut hésiter comme s’il voulait venir à nous. Mais il resta immobile, la face pâle, les bras d’une raideur cataleptique… Allait-il donc tomber sur place ? Ses yeux, ses yeux fulgurants, quel regard ils jetaient à Marc, qui affectait de ne point faire attention à lui ! Et, lorsque nous l’eûmes laissé de quelques pas en arrière :

« Tu as remarqué cet individu ? me demanda mon frère.

— Oui, Marc.

— C’est ce Wilhelm Storitz dont je t’ai parlé.

— Je le sais.

— Tu le connais donc ?

— Le capitaine Haralan me l’a montré une ou deux fois déjà.

— Je croyais qu’il avait quitté Ragz ? dit Marc.

— Il paraît que non, ou, du moins, qu’il y est revenu…

— Peu importe, après tout !

— Oui, peu importe, » répondis-je.

Mais, à mon avis, l’absence de Wilhelm Storitz eût été plus rassurante.

Vers neuf heures du soir, les premières voitures s’arrêtèrent devant l’hôtel Roderich, et les salons commencèrent à se remplir. Le docteur, sa femme, sa fille, recevaient leurs invités à l’entrée de la galerie resplendissante de l’éclat des lustres. Le Gouverneur de Ragz ne tarda pas à être annoncé ; ce ne fut pas sans grandes marques de sympathie que Son Excellence présenta ses compliments à la famille. Mlle Myra fut particulièrement l’objet de ses prévenances, ainsi que mon frère. D’ailleurs les félicitations vinrent de toutes parts aux fiancés.

Entre neuf et dix heures affluèrent les autorités de la ville, les