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les transes de jovita foley.

— Moi… malade !… Tu es folle !… Ce sont les nerfs qui me soutiennent, qui me donnent l’endurance, et je serai nerveuse tout le temps du voyage !…

— Soit, Jovita, mais alors si ce n’est pas toi qui prends le lit… ce sera moi…

— Toi… toi !… Eh bien… avise-toi d’être malade ! s’écria la très excellente et trop expansive demoiselle, qui se jeta au cou de Lissy Wag.

— Alors… sois calme, répliqua Lissy Wag en répondant à ses baisers, et tout ira bien ! »

Jovita Foley, non sans grands efforts, parvint à se maîtriser, épouvantée à la pensée que son amie pourrait être alitée le jour du départ.

Le 7, dans la matinée, en revenant de l’Auditorium, Jovita Foley rapporta la nouvelle que le quatrième partant, Harris T. Kymbale, ayant obtenu le point de six, allait se rendre d’abord dans l’État de New York, au pont du Niagara, et de là à Santa Fé, New Mexico.

Lissy Wag ne fit qu’une réflexion à ce sujet, c’est que le reporter de la Tribune aurait une prime à payer.

« Voilà ce qui n’embarrassera guère son journal ! lui répliqua son amie.

— Non, Jovita, mais cela nous embarrasserait fort, si nous étions obligées de débourser mille dollars au début… ou même dans le cours du voyage ! »

Et l’autre de répondre, comme d’habitude, par un mouvement de tête, qui signifiait clairement : Cela ne se produira pas… Non ! cela ne se produira pas !…

Au fond, c’était ce dont elle s’inquiétait le plus, bien qu’elle n’en voulût rien laisser paraître. Et, chaque nuit, pendant un sommeil agité qui troublait celui de Lissy Wag, elle rêvait à haute voix de pont, d’hôtellerie, de labyrinthe, de puits, de prison, de ces funestes cases où les joueurs devaient payer des primes simples, doubles, triples, pour être admis à continuer la partie.