Page:Verne - Le Testament d’un excentrique, Hetzel, 1899.djvu/413

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
391
les pérégrinations d’harris t. kymbale.

Olympia, qui arrive le lendemain matin dans cette ville, après un trajet de trois cent cinquante milles.

« Nota. — Harris T. Kymbale est prié de ne rien perdre du temps qui lui est strictement mesuré, et de ne pas oublier que de grosses sommes sont engagées au journal sur les chances du Pavillon Vert. »

La dépêche était longue, mais claire, explicite, formelle. Le destinataire n’avait qu’à se conformer à ses prescriptions, et il serait à son poste, le jour dit, pour recevoir celle de son quatrième tirage. Il fallait espérer, d’ailleurs, qu’il ne se produirait aucun retard, car, ne fût-il que d’une demi-journée, il suffirait à compromettre le résultat du voyage.

Que l’on se rassure, Harris T. Kymbale était résolu à faire toute diligence. S’il passa la nuit à Omaha, c’est que le premier train ne partait que le lendemain. Il le prit donc, et dans la soirée, il descendit à Julesburg-Jonction, près de l’endroit où la voie vient affleurer la frontière du Colorado, non loin de la South-Platte River.

Cette fois, en quittant Charleston, le journaliste avait eu la précaution de ne point se mettre en évidence afin d’éviter les réceptions et leurs suites fâcheuses. Toutefois, à Julesburg, il n’aurait pu conserver l’incognito, car le stage commandé attendait son arrivée en cette bourgade.

Et, d’ailleurs, ses partisans, accourus à la gare, comprirent qu’il ne fallait le retarder sous aucun prétexte, que les heures étaient comptées, que cette excursion aux Mauvaises Terres du Nebraska devait s’accomplir dans un temps rigoureux. Ils furent donc les premiers, quand ils reçurent sur le quai de la gare le reporter en chef de la Tribune, à lui conseiller de partir à l’instant. Et même une douzaine de ces Anglo-Américains, qui, avec les émigrants et un certain nombre de Sioux devenus citoyens des États-Unis, composent la population nebraskienne, avaient pris leurs dispositions pour l’accompagner. Cette escorte n’était pas à dédaigner sur ces territoires où quelques fauves à deux pieds ou à quatre pattes se rencontrent encore.