Page:Verne - Les Enfants du capitaine Grant.djvu/157

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lui, et se représentait cette perspective horrible, maintenant inévitable, d’être dévoré vivant ! Il ne fut pas maître de son émotion ; il attira l’enfant sur sa poitrine, il le serra contre son cœur, il colla ses lèvres à son front, tandis que des larmes involontaires coulaient de ses yeux.



Robert le regarda en souriant.

« Je n’ai pas peur ! dit-il.

— Non ! mon enfant, non, répondit Glenarvan, et tu as raison. Dans deux heures, le jour viendra, et nous serons sauvés ! — Bien, Thalcave, bien, mon brave Patagon ! » s’écria-t-il au moment où l’Indien tuait à coups de crosse deux énormes bêtes qui tentaient de franchir la barrière ardente.

Mais, en ce moment, la lueur mourante du foyer lui montra la bande des aguaras qui marchait en rangs pressés à l’assaut de la ramada.

Le dénoûment de ce drame sanglant approchait ; le feu tombait peu à peu, faute de combustible ; la flamme baissait ; la plaine, éclairée jusqu’alors, rentrait dans l’ombre, et dans l’ombre aussi reparaissaient les yeux phosphorescents des loups-rouges. Encore quelques minutes, et toute la horde se précipiterait dans l’enceinte.

Thalcave déchargea pour la dernière fois sa carabine, jeta un ennemi de plus à terre, et, ses munitions épuisées, il se croisa les bras. Sa tête s’inclina sur sa poitrine. Il parut méditer silencieusement. Cherchait-il donc quelque moyen hardi, impossible, insensé, de repousser cette troupe furieuse ? Glenarvan n’osait l’interroger.

En ce moment, un changement se produisit dans l’attaque des loups.