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les indes-noires.

« Mais on pouvait se perdre dans ces longues galeries, Nell. Ne craignais-tu donc pas de t’y égarer ?

— Non, Harry. Je connaissais, depuis longtemps, tous les détours de la nouvelle houillère !

— N’en sortais-tu pas quelquefois ?…

— Oui… quelquefois… répondit en hésitant la jeune fille, quelquefois, je venais jusque dans l’ancienne mine d’Aberfoyle.

— Tu connaissais donc le vieux cottage ?

— Le cottage… oui… mais, de bien loin seulement, ceux qui l’habitaient !

— C’étaient mon père et ma mère, répondit Harry, c’était moi ! Nous n’avions jamais voulu abandonner notre ancienne demeure !

— Peut-être cela aurait-il mieux valu pour vous !… murmura la jeune fille.

— Et pourquoi, Nell ? N’est-ce pas notre obstination à ne pas la quitter, qui nous a fait découvrir le nouveau gisement ? Et cette découverte n’a-t-elle pas eu des conséquences heureuses pour toute une population qui a reconquis ici l’aisance par le travail, pour toi, Nell, qui, rendue à la vie, as trouvé des cœurs tout à toi !

— Pour moi ! répondit vivement Nell… Oui ! quoi qu’il puisse arriver ! Pour les autres… qui sait ?…

— Que veux-tu dire ?

— Rien… rien !… Mais, il y avait danger à s’introduire, alors, dans la nouvelle houillère ! Oui ! grand danger ! Harry ! Un jour, des imprudents ont pénétré dans ces abîmes. Ils ont été loin, bien loin ! Ils se sont égarés…

— Égarés ? dit Harry en regardant Nell.

— Oui… égarés… répondit Nell, dont la voix tremblait. Leur lampe s’est éteinte ! Ils n’ont pu retrouver leur chemin…

— Et là, s’écria Harry, emprisonnés pendant huit longs jours, Nell, ils ont été près de mourir ! Et sans un être secourable, que Dieu leur a envoyé, un ange peut-être, qui leur a secrètement apporté un peu de nourriture, sans un guide mystérieux qui, plus tard, a conduit jusqu’à eux leurs libérateurs, ils ne seraient jamais sortis de cette tombe !

— Et comment le sais-tu ? demanda la jeune fille.

— Parce que ces hommes c’était James Starr… c’était mon père… c’était moi, Nell ! »

Nell, relevant la tête, saisit la main du jeune homme, et elle le regarda avec une telle fixité, que celui-ci se sentit troublé jusqu’au plus profond de son cœur.