Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, Partie II, 1894.djvu/161

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Avec les vents régnants, la traversée promettait d’être délicieuse le long du littoral. Portentosa Africa ! aurait dit Gildas Trégomain, s’il eût connu la pompeuse épithète dont les Romains saluaient ce continent. En vérité, pour peu que leur esprit n’eût pas été ailleurs, maître Antifer et ses compagnons, en passant devant la factorerie Chillu, se seraient abandonnés à la juste admiration que méritent les beautés naturelles de cette côte. Seul entre tous, le gabarier regardait en homme qui veut rapporter, à tout le moins, quelque souvenir de son voyage. Et que pourrait-on imaginer de plus splendide que cette succession de forêts verdoyantes, étagées sur les premières ondulations du sol, dominées çà et là par les hauteurs de ces monts sublimes, les Strauch, noyés de brumes chaudes en leur profond recul ! De mille en mille, la grève s’échancre pour livrer passage à ces cours d’eau, sortis des bois touffus, et que ces chaleurs tropicales ne parvenaient point à sécher. Il est vrai, toute cette eau ne va pas à la mer. De nombreux volatiles lui en volent quelques gouttes, des paons, des autruches, des pélicans, des plongeons dont les ébats animent ces