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à bord du boundary.

Un grand brick-goélette, qui venait de se dégager des navires rangés le long des quais, appareillait pour sortir de la baie, son avant dirigé vers la pointe Island. Il était aidé par un remorqueur qui devait le conduire en dehors du goulet, et il prenait déjà une certaine vitesse.

Ce brick-goélette se trouvait sur la route de l’embarcation à vapeur, et même assez près, pour qu’il fût urgent de l’éviter en passant à son arrière. C’est ce qui avait motivé le cri du matelot à l’homme de barre.

Un sentiment d’inquiétude saisit les passagers, — inquiétude d’autant plus justifiée que le port était encombré de navires, mouillés çà et là sur leurs ancres. Aussi, par un mouvement bien naturel, reculèrent-ils vers l’arrière.

La manœuvre était tout indiquée : il fallait stopper, afin de faire place au remorqueur et au brick, et ne se remettre en marche que lorsque le passage serait libre. Quelques chaloupes de pêche, lancées dans le vent, rendaient encore le passage plus difficile, tandis qu’elles croisaient devant les quais de San-Diégo.

« Attention ! répéta le matelot de l’avant.

— Oui !… oui ! répondit l’homme de barre. Il n’y a rien à craindre !… J’ai du large assez ! »

Mais, gêné par la brusque apparition d’un grand steamer qui le suivait, le remorqueur fit un mouvement auquel on ne pouvait s’attendre, et revint en grand sur bâbord.

Des cris se firent entendre, auxquels se joignirent ceux de l’équipage du brick-goélette, qui cherchait à aider la manœuvre du remorqueur en gouvernant dans la même direction.

C’est à peine si vingt pieds séparaient alors le remorqueur de la steam-launch.

Jane, très effrayée, s’était redressée. Mrs. Branican, par une impulsion instinctive, avait pris le petit Wat des bras de sa nourrice et le serrait contre elle.

« Sur tribord !… Sur tribord ! » cria vivement le capitaine du remor-