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derniers mots et dernier soupir.

Gilbert saisit la résine enflammée. Le métis souleva dans ses bras ce corps, qui n’était plus qu’une masse inerte, gravit les degrés de la poterne, pénétra par l’embrasure qui donnait accès dans l’enclos, et déposa son fardeau dans une des chambres du réduit.

Le mourant fut placé sur une couche d’herbes. Mars, prenant alors sa gourde, l’introduisit entre ses lèvres.

Le cœur du malheureux battait encore, quoique bien faiblement et à de longs intervalles. La vie allait lui manquer… Son secret ne lui échapperait-il donc pas avant son dernier souffle ?

Ces quelques gouttes d’eau-de-vie semblèrent le ranimer un peu. Ses yeux se rouvrirent. Ils se fixèrent sur Mars et Gilbert, qui essayaient de le disputer à la mort.

Il voulut parler… Quelques sons vagues s’échappèrent de sa bouche, un nom peut-être !

« Parle !… parle !… » s’écriait Mars.

La surexcitation du métis était vraiment inexplicable, comme si la tâche, à laquelle il avait voué toute sa vie, eût dépendu des dernières paroles de ce mourant !

Le jeune esclave essayait vainement de prononcer quelques paroles… Il n’en avait plus la force…

En ce moment, Mars sentit qu’un morceau de papier était placé dans la poche de sa veste.

Se saisir de ce papier, l’ouvrir, le lire à la lueur de la résine, cela fut fait en un instant.

Quelques mots y étaient tracés au charbon, et les voici :

« Enlevées par Texar à la Crique Marino… Entraînées aux Everglades… à l’île Carneral… Billet confié à ce jeune esclave… pour M. Burbank… »

C’était d’une écriture que Mars connaissait bien.

« Zermah !… » s’écria-t-il.

À ce nom, le mourant rouvrit les yeux, et sa tête s’abaissa comme pour faire un signe affirmatif.

Gilbert le souleva à demi, et, l’interrogeant :