Page:Verne - Robur le conquérant, Hetzel, 1904.djvu/187

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munie de sa mèche. De cette façon, la mèche pourrait brûler sans se trahir par son odeur ou son crépitement. Uncle Prudent l’alluma à son extrémité. Puis, repoussant le coffre sous la couchette :

« Maintenant, à l’arrière, dit-il, et attendons ! »

Tous deux sortirent et furent d’abord étonnés de ne pas voir le timonier à son poste habituel.

Phil Evans se pencha alors en dehors de la plate-forme.

« L’Albatros est toujours à la même place ! dit-il à voix basse. Les travaux n’ont pas été terminés !… Il n’aura pu partir ! »

Uncle Prudent eut un geste de désappointement.

« Il faut éteindre la mèche, dit-il.

— Non !… Il faut nous sauver !… répondit Phil Evans.

— Nous sauver ?

― Oui !… Par le câble de l’ancre, puisqu’il fait nuit !… Cent cinquante pieds à descendre, ce n’est rien !

― Rien, en effet, Phil Evans, et nous serions fous de ne pas profiter de cette chance inattendue ! »

Mais, auparavant, ils rentrèrent dans leur cabine et prirent sur eux tout ce qu’ils pouvaient emporter en prévision d’un séjour plus ou moins prolongé sur l’île Chatam. Puis, la porte refermée, ils s’avancèrent sans bruit vers l’avant.

Leur intention était de réveiller Frycollin et de l’obliger à prendre la fuite avec eux.

L’obscurité était profonde. Les nuages commençaient à chasser du sud-ouest. Déjà l’aéronef tanguait quelque peu sur son ancre, en s’écartant légèrement de la verticale par rapport au câble de retenue. La descente devait donc offrir un peu plus de difficultés. Mais ce n’était pas pour arrêter des hommes qui, tout d’abord, n’avaient pas hésité à jouer leur vie.

Tous deux se glissèrent sur la plate-forme, s’arrêtant parfois à l’abri des roufles pour écouter si quelque bruit se produisait. Silence absolu partout. Aucune lumière à travers les hublots. Ce n’était pas seulement le silence, c’était le sommeil dans lequel était plongé l’aéronef.