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TEMPÊTE

— Et, suivant toi, Dick, la côte américaine ne doit pas être éloignée, maintenant ?

— Elle ne peut l’être, mistress Weldon, et si quelque chose m’étonne, c’est de ne pas en avoir déjà connaissance !

— Cependant, reprit Mrs Weldon, le navire a toujours fait bonne route.

— Toujours, depuis que le vent s’est établi dans le nord-ouest, répondit Dick Sand, c’est-à-dire depuis le jour où nous avons perdu notre malheureux capitaine et son équipage ! C’était le 10 février. Nous sommes au 9 mars. Il y a donc de cela vingt-sept jours !

— Mais, à cette époque, à quelle distance étions-nous alors de la côte ? demanda Mrs Weldon.

À quatre mille cinq cents milles environ, mistress Weldon. S’il est des choses sur lesquelles j’ai plus d’un doute, ce chiffre, du moins, je puis le garantir à vingt milles près.

— Et quelle a été la vitesse du navire ?

— En moyenne, cent quatre-vingts milles par jour, depuis que le vent a fraîchi, répondit le novice. Aussi, je suis surpris de ne pas être en vue de la terre ! Et ce qui est plus extraordinaire encore, c’est que nous ne rencontrons pas même un seul des bâtiments qui fréquentent ordinairement ces parages !

— N’as-tu pu te tromper, Dick, reprit Mrs Weldon, en estimant la vitesse du Pilgrim ?

— Non, mistress Weldon. Sur ce point-là, je n’ai pu me tromper. Le loch a été jeté toutes les demi-heures, et j’ai relevé très exactement ses indications. — Tenez, je vais le faire jeter à nouveau, et vous verrez que nous marchons en ce moment à raison de dix milles à l’heure, ce qui nous donnerait plus de deux cents milles par jour ! »

Dick Sand appela Tom et lui donna l’ordre de jeter le loch, — opération à laquelle le vieux noir était maintenant fort habitué.

Le loch, solidement amarré à l’extrémité de la ligne, fut apporté et envoyé dehors.

Vingt-cinq brasses étaient à peine déroulées, lorsque la ligne mollit subitement entre les mains de Tom.

« Ah ! monsieur Dick, s’écria-t-il.

— Eh bien, Tom ?

— La ligne a cassé !

— Cassé ! s’écria Dick Sand ! Et le loch est perdu ! »

Le vieux Tom montra le bout de la ligne qui était resté dans sa main.