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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

sible de se tenir sur son pont. De sa mâture, on ne voyait plus rien. Aux porte-haubans pendaient seulement quelques bouts de filin brisé, et les chaînes rompues des capes de mouton. Sur la joue de tribord s’ouvrait un large trou entre la membrure et les bordages enfoncés.

« Ce navire a été abordé, s’écria Dick Sand.

— Ce n’est pas douteux, répondit le capitaine Hull, et c’est un miracle qu’il n’ait pas immédiatement coulé.

— S’il y a eu abordage, fit observer Mrs Weldon, il faut espérer que l’équipage de ce bâtiment aura été recueilli par ceux qui l’ont abordé.

— Il faut l’espérer, mistress Weldon, répondit le capitaine Hull, à moins que cet équipage n’ait cherché refuge sur ses propres chaloupes, après la collision, au cas où le bâtiment abordeur aurait continué sa route, — ce qui se voit, hélas ! quelquefois !

— Est-il possible ! Ce serait faire preuve d’une bien grande inhumanité, monsieur Hull !

— Oui, mistress Weldon… oui !… et les exemples ne manquent pas ! Quant à l’équipage de ce navire, ce qui me ferait croire qu’il l’a plutôt abandonné, c’est que je n’aperçois plus un seul canot, et, à moins que les gens du bord n’aient été recueillis, je penserais plus volontiers qu’ils ont tenté de gagner la terre ! Mais, à cette distance du continent américain ou des îles de l’Océanie, il est à craindre qu’ils n’aient pu réussir !

— Peut-être, dit Mrs Weldon, ne connaîtra-t-on jamais le secret de cette catastrophe ! Cependant, il serait possible que quelque homme de l’équipage fût encore à bord !

— Ce n’est pas probable, mistress Weldon, répondit le capitaine Hull. Notre approche serait déjà reconnue, et on nous ferait quelque signal. Mais nous nous en assurerons. — Lofe un peu, Bolton, lofe ! » cria le capitaine Hull, en indiquant de la main la route à suivre.

Le Pilgrim n’était plus qu’à trois encâblures de l’épave, et on ne pouvait plus douter que cette coque n’eût été complètement abandonnée de tout son équipage.

Mais, en ce moment, Dick Sand fit un geste qui commandait impérieusement le silence.

« Écoutez ! écoutez ! » dit-il.

Chacun prêta l’oreille.

« J’entends comme un aboiement ! » s’écria Dick Sand.

En effet, un aboiement éloigné retentissait à l’intérieur de la coque. Il y avait