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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

« Voilà une chose curieuse ! dit Mrs Weldon.

— C’est très singulier, en effet, répondit le capitaine Hull, qui regardait attentivement les deux lettres.

— S. V., — dit Mrs Weldon.

— S. V., — répéta le capitaine Hull. Mais ce sont précisément les lettres que porte le collier de Dingo ! »

Puis, tout à coup, se retournant vers le vieux noir :

« Tom, demanda-t-il, ne m’avez-vous pas dit que ce chien n’appartenait que depuis peu au capitaine du Waldeck ?

— En effet, monsieur, répondit Tom. Dingo n’était à bord que depuis deux ans au plus.

— Et n’avez-vous pas ajouté que le capitaine du Waldeck avait recueilli ce chien sur la côte occidentale de l’Afrique ?

— Oui, monsieur, aux environs de l’embouchure du Congo. Je l’ai entendu souvent dire au capitaine.

— Ainsi, demanda le capitaine Hull, on n’a jamais su à qui avait appartenu ce chien, ni d’où il venait ?

— Jamais, monsieur. Un chien trouvé, c’est pis qu’un enfant ! Ça n’a pas de papiers, et, de plus, ça ne peut pas s’expliquer. »

Le capitaine Hull s’était tu et réfléchissait.

« Ces deux lettres éveillent-elles donc en vous un souvenir ? demanda Mrs Weldon au capitaine Hull, après l’avoir laissé quelques instants à ses réflexions.

— Oui, mistress Weldon, un souvenir, ou plutôt un rapprochement au moins singulier.

— Lequel ?

— Ces deux lettres pourraient bien avoir un sens et nous fixer sur le sort d’un intrépide voyageur…

— Que voulez-vous dire ? demanda Mrs Weldon.

— Voici, mistress Weldon. En 1871, — il y a deux ans par conséquent, — un voyageur français partit, sous l’inspiration de la Société de géographie de Paris, avec l’intention d’opérer la traversée de l’Afrique de l’ouest à l’est. Son point de départ était précisément l’embouchure du Congo. Son point d’arrivée devait être autant que possible le cap Deldago, aux bouches de la Rovouma, dont il devait descendre le cours. Or, ce voyageur français se nommait Samuel Vernon.

— Samuel Vernon ! répéta Mrs Weldon.