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LES ANGLAIS AU POLE NORD

En effet, ce devait être un ours de grande dimension ; égaré dans le brouillard, il allait, venait, retournait sur ses pas, au risque de heurter ces voyageurs, dont certainement il ne soupçonnait pas la présence.

« Cela se complique ! » pensa le docteur en restant immobile.

Tantôt il sentait le souffle de l’animal, qui peu après, se perdait dans ce frost-rime ; tantôt il entrevoyait les pattes énormes du monstre battant l’air, et elles passaient si près de lui que ses vêtements furent plus d’une fois déchirés par des griffes aiguës ; il sautait en arrière, et alors la masse en mouvement s’évanouissait à la façon des spectres fantasmagoriques.

Mais, en reculant ainsi, le docteur sentit le sol s’élever sous ses pas ; s’aidant des mains, se cramponnant aux arêtes des glaçons, il gravit un bloc, puis deux ; il tâta du bout de son bâton.

« Un ice-berg ! se dit-il ; si j’arrive au sommet, je suis sauvé ! »

Et, ce disant, il grimpa avec une agilité surprenante à quatre-vingts pieds d’élévation environ ; il dépassait de la tête le brouillard gelé, dont la partie supérieure se tranchait nettement.

« Bon ! » se dit-il, et, portant ses regards autour de lui, il aperçut ses trois compagnons émergeant de ce fluide dense.

« Hatteras !

— Monsieur Clawbonny !

— Bell !

— Simpson ! »

Ces quatre cris partirent presque en même temps ; le ciel, allumé par un